Spectateurs de La mélancolie des dragons au Théâtre des Amandiers

     À la suite de ce spectacle, les étudiants de MàNAA ont adressé une lettre à son metteur en scène, directeur du Théâtre des Amandiers, Philippe Quesne.

 

"Lettre à diction ouverte.
Ok, Pourquoi pas Philippe.
 
À la recherche d'un nouvel esthétisme.. C'est une désagréable impression, celle d'être mis à l'écart d'un drôle de jeu. Un jeu de plateau. Un plateau de jeu...Oh pas un monopoly, non non...plus un scrabble ! Un scrabble qui puerait le vieux cuir et l'essence. Qui s'agiterait à chaque coup de cordes, à chaque scorpion. Malignement placé. Entres deux canettes de bière et six énergumènes. Trop -(p)heureux de se faire piquer. Un scrabble en famille c'est toujours long, et ça demande beaucoup de réflexion. J'y réfléchirai donc... Savoir ce qui cloche... Pourquoi moi je ne peux pas jouer. Pourquoi je ne veux pas y jouer... T'as pas de réponses toi ? Non. Ce serait tricher. Un peu comme cracher des bulles et souffler de l'eau. Ça gâcherait le plateau...Tu m'excuseras donc de voir ta pièce comme un jeu parricide. Parricide de normalité. Comme du plexiglas couvert de cheveux moites et de doigts lisses.
Faussés !
Tu m'excuseras d'y voir des pions sans goût et sans odeur. Martyriser par deux dragons aux cigares qui dérangent. Et qui fument entre deux papiers mouillés des vapeurs nauséabondes. Grignotant des chips trop grasses dans une voiture trop petite. Je crois.. Je crois qu'il manque la lettre E. Celle un peu graissée...tu vois. Celle utile. Volée dans la pioche ?
Je regardais d'en haut, je voyais tout. Et je retenais mal.
C'était violent, c'était agréable." Sarah Robin

 
 
"À l’attention de Monsieur  P.Quesne                                                                 20 /01/2015
 
Donner la parole à  cet univers,  l’habiter d’éléments  incongrus,  ne pas s’attendre à.
Ne pas s’attendre tout simplement .
Dans la salle personne ne bouge,  la musique se répand, on sourit  au voisin, tout le monde connaît ses classiques, le geste prend place, la parole s’incline, nous devenons passagers  et attendons le prochain morceau .

Faire semblant de ne pas être,  faire tomber les masques ou la perruque, démonter les codes,  créer avec peu mais imaginer beaucoup,  s’inventer un monde, y croire pour le voir - ceux  qui n’ont pas cru ont  dû se perdre en chemin, Isabelle a vu, alors pourquoi pas nous. 
L’apologie du ‘’ tout est faux’’ , même nous, m’a traversé l’esprit. 
Votre pièce m’a fait l’effet d’un magicien qui sort de son chapeau  un  lapin dont les oreilles dépassent, on nous montre tout,  on ne cache rien et pourtant. 
Pourtant le doute s’installe,  qui sont ces hommes au sourire avenant et à  la chevelure synthétique, vendeurs de rêve, charlatans, artistes de l’éphémère qui transcendent  une bassine en fontaine, une voiture en montagne ?
Haussement de sourcils, que font-ils ?  ça, un parc  ?
Un parcours  onirique peut être ? 10% d’ustensiles, 50% d’immatériel.
Le texte n’a pas la primauté, il illustre plus qu’il ne raconte, ponctue telle une virgule entre une bulle de savon et un courant d’air. 
Des inventeurs, des fous, le doute subsiste encore, cette effervescence d’idées, d’objets  qui sortent  de nulle part et ‘’cette  scène‘’ aux perruques  flottantes qui semblent rire à la face de leurs voisines et qui tombent tout autant qu’elles, du chien jusqu'à l’échelle,  je ne prends  ni l’un ni l’autre.      
Cet univers reste à  mes yeux un intrigant cocon surréaliste. Une phrase brillant dans la nuit avec le regard sombre et le sourire en coin d’un Antonin Artaud qui suspend ce moment,  qui il me semble pourrait se jouer éternellement malgré la disparition de nos regards et l’incompréhension de certains. 
Méditons ou rions sur la mélancolie , le dragon sommeillait, son souffle nous a touchés."               
Cassandra Bévillon  
 

 
"Ce qui a été très étrange aussi était qu’il n’y avait pas vraiment d’intrigue à laquelle se raccrocher, je m’attendais à tout moment que le spectacle sorte de la rythmique « Eh Isabelle, viens voir… - Oh ! Bah ça… », mais je pense que c’est l’une des choses qui rend ce spectacle hors-norme. Par notre nature nous cherchons toujours à classer, organiser ce que l’on voit, mais lorsqu’il n’y a pas de case où les classer, cela nous paraît « bizarre ». Par la suite, on voit d’autres choses similaires, que des personnes engagées, audacieuses, inventent, et cela suffit pour créer et nommer, ou pas,  cette nouvelle case. C’est ce que La mélancolie des dragons a provoqué (...)
     Je pense finalement que la mélancolie vient surtout du spectateur qui est à la fois amusé et perturbé de manière intermittente. En trois mots ce spectacle était Etrange, Amusant et Hors-norme."
Barbara Vignaux
 

 
"Ils présentent leur activité (des concerts assourdissants !), comme des enfants qui montrent leur dernier dessin à leurs parents. Ils transportent leur rêve commun, le parc d'attraction, minimaliste, amateur, et en montrent chaque partie à Isabelle, une spectatrice étrangement attentive, comme à une mère. Sont-ils épicuriens ? Ou Est-ce parce qu'ils n'ont rien d'autre, ni les moyens ni le choix ?"
Julie Nahon
 

 
"Cinq bâches noires de 6 mètres de haut qui cachent les rockeurs. Dans l'obscurité de la nuit, soulignées de quelques traits de lumière, elles se penchaient sur la "mère" de ces enfants. Elles semblaient représenter leurs cauchemars : des ombres, de grosses masses, la peur du noir, dans le silence total. Ou bien ils symbolisaient leurs déceptions à réelle échelle ? C'était un moment triste"
Julie Nahon

 



"Monsieur Philippe Quesne,
La Mélancolie des Dragons c'est un paysage enneigé, des sapins qui cachent une scène trop présente lors du spectacle, c'est un mobil-home tiré par une petite voiture, ce sont des Curly dévorés à pleines dents, ce sont des perruques installées sur le crâne des acteurs le temps d'une représentation, ce sont des grands gamins, des dragons créateurs, des fans incontestés de Rock mettant en avant leur répertoire bien garni, c'est aussi une exposition de cheveux qui tombe à l'eau peu à peu, ce sont des sourires à son voisin lorsqu'une chanson nous rappelle un souvenir, c'est de la flûte au sein d'un groupe très rock, c'est de la fumée épaisse qui nous embaume à deux reprises, c'est l'envie de créer, tout simplement.
Comment poser un seul adjectif pour qualifier un spectacle qui laisse aussi pantois ? Pourquoi vouloir s'interroger et chercher du sens là où il n'y en a (peut-être) pas ? Il faut regarder, apprécier ce que l'on voit au moment présent sans pour autant se poser une multitude de questions après un tel spectacle.
Etonnamment, c'est ce silence, en fin de spectacle, qui m'a mise mal à l'aise et a eu le plus de sens selon moi. «Pourquoi des bâches noires ? Pourquoi debout ? Pourquoi c'est aussi silencieux ? Est-ce que ça va s'arrêter ?» Le temps était suspendu pendant un moment. Ce passage était très émouvant, comme une pause dans le spectacle pour interroger le spectateur sur ce à quoi il était en train d'assister : un paysage sombre et presque terrifiant, une pause noire, une bile noire, de la mélancolie. Du début à la fin, un méli mélo de sentiments qui vacillaient aussi vite que les titres farfelus du parc d'attraction. Finalement, le créateur d'un tel spectacle est le plus grand des mélancoliques."
Agathe Vastel
 
 
"Bonjour Philippe, Je peux vous appeler ainsi ? Moi c'est Annaïs.
Je vous écris alors que mon réveil affiche 3h27 du matin. Je le fais tant que mon rêve est encore frais. Parce que cette nuit j'ai fait un rêve qui devrait vous plaire. On dit souvent que c'est dans les rêves que nous puisons l'inspiration. Puisse mon esprit fécond vous servir. C'était en hiver, en pleine forêt. Et pourtant je n'avais pas froid. Je me sentais un peu perdue au milieu de tous ces arbres. Puis j'aperçus de la lumière provenant d'une voiture. Une Citroën AX je crois. Non, je suis sûre. Avec des gens à l'intérieur. Ils étaient très stéréotypés. Cela m'a permis de reconnaitre instantanément une bande de rockers, des hards-rockers même. Je me suis sentie moins perdue. Les chansons qui défilaient dans la voiture je les connaissais, je les chantais. Et, comme un élément perturbateur, une femme est arrivée. Elle était si discrète que je ne l’avais pas vue. Cela me surprit. Elle semblait aussi perdue que moi. Et, comme moi, lorsqu'elle vit le groupe, elle s'y attacha. Je me souviens avoir ri d'une chose au réveil. Enfin plusieurs même. Rire c'est un peu fort. Je dirais, sourire. La vieille dame qui s'était approchée du véhicule, avait tenté de le réparer, balançait des pièces à droite à gauche, avec pour résultat de faire sortir de la fumée du capot. Au lieu de faire redémarrer le véhicule, cela n'avait fait qu'empirer les choses. Elle avait l'air dépité. Je n'arrivais pas bien à savoir ce qu'elle pensait de tout ça. Comme si elle était détachée des évènements qui se déroulaient. Elle s'appelait Isabelle cette dame. J'entendais son nom partout. Je la plaignais, elle n'avait pas un seul moment de répit. On l'appelait, encore et encore, pour tout et pour rien. Mais surtout pour rien. C'était des broutilles, des idioties. Et pourtant, à chaque fois, elle réagissait comme si c'était extraordinaire. En fait on aurait dit une personne simple d'esprit. Ils étaient tous comme ça. A s'émerveiller des petites choses de la vie, des choses simples, qu'en temps normal nous ne remarquons pas. Il y a eu une chose qui m'a touché dans ce rêve. C'était les bulles. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais devant ça, moi aussi je me suis émerveillée. C'était une attraction je crois. Même si ça me paraissait ridicule que c'en soit une. C'était de simples bulles. Des bulles de savons, qui s'élevaient dans l'air, s'envolaient... J'aurais voulu que mon rêve s'arrête là. Au lieu de ça quelque chose d'étrange s'est produit. Je me suis sentie oppressée, enfermée. Des formes immenses, noires, se sont mises à m'entourer. Je pris peur. Et d'un coup je remarquai qu'elles avaient la forme de céréales, de "trésors". Et la pression retomba, les masses noires aussi, me laissant me réveiller. J'arrive ici à la fin de ce rêve qui me laisse confuse. Je vous ai conté tout cela, mais en réalité, ce ne sont pas les choses dont je me suis souvenue en premier. Je me suis rappelée de ces deux adorables chiens qui jouaient dans la neige, et là, j'ai ri.
Bien à vous
"
Annaïs Helou
 
 
"Cergy, le 21/01/2015
                            Monsieur Quesne
         "Curiosité" serait-il le mot pour décrire votre pièce ?
         Cest pourquoi, jai décidé de vous écrire cette lettre à la manière dont le personnage d’Isabelle sexprime.
 
         Le parc dattraction existe-il vraiment ?
         Où sont passés les dragons ?
         Dailleurs, se sont-ils décidés pour le nom ?
 
         Isabelle se promène souvent seule, la nuit dans les bois enneigés ?
         Sy connaît-elle vraiment en mécanique ?
         Comment a-t-elle pu se faufiler dans le capot de la voiture ?
 
         Il y avait de vrais chiens sur scène ?
         Pourquoi des chiens ?
         Ont-ils un lien de parenté ?
 
         Que mettez-vous dans les immenses sacs plastiques ?
         Était-ce une illustration de la mélancolie contemporaine ?
         Que projetez-vous dans ce grand corps noir rempli de vide ?
 
         Le dialogue a-t-il encore de limportance ?  
         Ça consomme beaucoup une Citroën AX ?
         Pourquoi rompre sans cesse lillusion du décor ?
 
         Reste-il de la poésie dans le quotidien ?
         Cherche-t-on à faner le réel ?"
Camille Yang
       

 
 
 
 
 

 

 

      
 
 

 
 
 
 

 

Spectateurs du Futur faisons table rase, aux Amandiers

Les étudiants de MàNAA ont assisté au Théâtre des Amandiers, au spectacle de Théo Mercier, Du futur faisons table rase.


     "Le soir de ce vendredi 5 décembre, je me suis rendu au théâtre en ne sachant à quoi m'attendre. Je n'avais souhaité lire ni critiques, ni synopsis, afin de me laisser surprendre. Quelle fut ma stupeur... dès la sortie en gare de Nanterre !
     Un très jeune couple nous demande la direction du Théâtre des Amandiers. Cet événement m'interpella, car aucun des deux individus n'avait l'allure des personnes que l'on rencontre généralement au théâtre.
     En arrivant sur le lieu, quelques éléments éveillèrent davantage mes soupçons quant à la singularité de la pièce à laquelle j'allais assister. Tout d'abord les quelques particuliers  postés devant le bâtiment, buvant une bouteille de vin au goulot. Si on les avait trouvés devant Paris Bercy, attendant d'assister à l'apparition scénique de leur idole, je les aurais à peine remarqués. Cependant, dans le contexte présent, ils attiraient davantage ma curiosité.
     En entrant dans le hall du théâtre, je perçus, avec un style vestimentaire démarqué, une population jeune fortement présente. Cela ne fait que renforcer mes soupçons, d'autant que trois employés du théâtre étaient postés à l'entrée afin de distribuer des boules Quiès.
     Ce n'est que durant la troisième partie de la pièce que j'ai pu affirmer mes conjectures. L'apparition du groupe Sexy Sushi a eu l'effet d'une claque, d'une douche froide, d'un glaçon coincé dans la nuque. Leur énergie déferlante, la lumière électrisante, les décibels rugissants, on aurait pu se croire dans une rave party à la piscine Molitor. Mais le plus frappant reste la réaction du public, d'une inertie mémorable. Malgré la présentation d'un déchaînement anarchiste, les individus assis semblaient sculptés - même une photographie n'aurait paru si statique.
     Une impression de mur séparant la scène des gradins n'a jamais été aussi forte. On y percevait très nettement deux univers, deux rythmes dans l'écoulement du temps, deux forces : l'une dans l'énergie, l'autre dans la masse. Ces deux mondes en confrontation, d'une si grande intensité, n'ont pu perdurer. Tout cela a fini par s'évanouir dans un épais brouillard artificiel. Eclipsant par sa manifestation la beauté d'une différence."
                                Camille Yang
 
 
     "Une sorte de petit concert intégré sur une grande scène"      Alexandre Samson
     "La musique occupe alors tout l'espace et nous déconnecte de toute réalité, elle nous immerge dans une énergie ultra-violente"                                                   Charlène Scribe
 

 
 
     "Leur façon de rester totalement immobile pendant le reste du spectacle (avant et après) était intéressante, comme si le passé ne se mettait en marche que quand on le voulait (si on veut s'en souvenir par exemple), et sinon il ne bouge pas : c'est le passé."                                     Héléna Ziakas

 
 
 

"Performance poétique dans sa lenteur"         Alexandre Samson
 
 

 
     "Mais ce qui rendait la scène encore plus drôle était les moments où un message tombait du haut de la scène, suspendu par un fil : à chaque fois la femme hurlait de façon grotesque, la bouche pleine, comme si elle avait la prémonition qu'un message allait arriver"                                           Laura Vien
 
 
 
 
"Le contraste est saisissant. Je fais des sauts dans le temps. Le spectacle est pour moi comme des montagnes russes : j'apprécie, puis je déteste, je me laisse emporter parce que je vois, je cherche un sens, je me lasse... Confusion créée par le mélange constant du passé, du présent et du futur..."  Joyce Da Penha Sanches
 
"Cette pièce de théâtre m'a semblé tout droit sortie d'un rêve, d'une hallucination. En fait je suis restée durant toute la durée du spectacle, à me demander si ce que je vivais était réel".     Marion Robin
 
 
 
         "Il y a de drôles de choses à dire. Il y a tout autant à voir.
          Une soirée en dix minutes. Top chronologique.
 
          Il serait aimable d'apprécier. Il serait triste de raisonner...
          Un hommage à l'art avec des relents d'affinage.
          « Ou quand l'artiste dit vague. »
          Un postiche délicieusement mené
          par des saveurs amères, de fumée et d'oreilles.
          Un lait de vache qui prend forme,
          un cri de corbeau joyeux,
          Et un peu de Philippe Katerine.
         Une démonstration humaine qui dit oui à rien
          qui dit non à tout. Ou peut être est-ce l'inverse ?
          Un peu d'écriture éponyme et du tissu décadent.
          On y ressortira aux bras d'un homme.
          Un homme « spaghetti ». "                 Sarah Robin

 

 

 

Exposition ɔrdeklu des MàNAA à la Petite Galerie


En octobre 2013, les étudiants de Mise à Niveau en Arts Appliqués, se sont lancés dans un travail de recherche. Il s’agissait de récolter, au fil des semaines, des éléments insolites, aperçus ou entendus, sans registre prédéfini, à transcrire sous forme brève ou à restituer visuellement. Ces bizarreries, dénichées dans le quotidien de chacun, étaient destinées à être recueillies dans un carnet collectif d’incongrus.















L’exposition ɔrdeklu est le fruit de cette prospection.

Les MàNAA découvrent Nippon 2011 de Frédérick Carnet...




 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Atelier d'écriture à la petite Galerie. Les étudiants choisissent une des photographies de Frédérick Carnet et composent un texte en suivant l'une des trois consignes suivantes : écrire à la 2e personne du singulier ; insérer plusieurs fois ces mots de l'artiste "à contre-sens du flot" ; ouvrir ou clore son texte par ces autres mots de l'artiste "J'aimerais mourir sans colère".






J’aimerais mourir sans colère.
Et m’éteindre sans passion
Etreint par un ravissement tiède.
J’aimerais mourir avec éclat.
Et comme le dernier rappel d’un comédien
Bruyamment, achever mon existence.
Eclater dans cette dernière danse
Où l’on ne meurt ni froid, ni vieux, ni maladif
Où l’on y meurt fier.
Comme le dernier consentement que l’on fait au monde
Celui, impossible, de continuer sans nous.
Un saisissement froid
J’aimerais taire ce cri qui me tue
Mais tout écho sonne comme un refus.
La farce d’un enfant résigné
Vaincu, prétend que c’était son idée.
Il s’en va, et moi
J’aurais préféré mourir sans colère.
Clément Bascou


 








 

À toi qui flottes sur l’eau, emporté par le courant. Autrefois tout, maintenant tu n’es rien. L’eau seule reste maîtresse de tes mouvements. Porte, fenêtre, façade, toiture… Plus personne ne sait d’où tu viens et personne ne veut savoir où tu vas. Le temps s’est arrêté, tout est gris… immobile. Jamais plus tu n’entendras les cris des femmes les jours de marché, les rires des écoliers, les soupirs du vieil homme fatigué…
Toi, simple morceau de bois, tu es désormais destiné à naviguer sur ces eaux mortelles pour l’éternité.
Alexia Limoges

 

Cette dune,
Regarde ces dunes
Observe leur pureté au beau matin
Elles qui vivent si bien sans ce soucier du lendemain.
J'aimerais être comme elles.
Si propres Si saines
Si parfaites,
on pourrait même croire que rien ne peut les atteindre que rien ne pourra les détruire. J'aimerais être comme elles.
Elles grandissent un peu chaque jour mais savent naïvement qu'elles seront là pour toujours. J'aimerais être comme elles.
Elles ne doivent rien à personne,
Seul le vent guide leur humeur et surélève leur bonheur.
J'aimerais être comme elles :
J'aimerais mourir sans colère.
Pauline Dumont


Tu me regardes de haut, moi qui est déjà plus bas que terre ?? ... S'il te plait arrête .. 
Tes yeux, ton regard me transpercent tels une arme s'enfonçant tout doucement dans ma poitrine ..
Ta grandeur, ta splendeur .. ton calme, ton innocence .. ta naïveté, ton imprudence.. ma jalousie m'écrase peu à peu ..
N'ai-je pas le droit de rêver ? N'ai-je pas le droit de sourire ? N'ai-je pas le droit de respirer .. 
Mon esprit te transforme, tu deviens vicieuse et égoïste.
Après tout, il n'y a pas assez de bonheur pour tous. 
Melissa Rioul



Lorsque tu es revenu du japon, tu m'as dit que tu aimerais mourir sans colère. Le Japon et son peuple t'ont tant serré le cœur que tu es allé jusqu'au point de te mettre à leur place, comme si tu avais toujours grandi là-bas. Après le tsunami de Fukushima, les hommes ont dû accepter que la Nature, l'Océan, les éléments… se soient déchaînés sous leurs yeux. Quand tu es revenu du Japon, tu as insisté sur le fait que les Japonais sont des gens très proches de la Nature et que leur spiritualité est ancrée dans toutes les choses naturelles qui les entourent. Et tu m'as dit que tel un Japonais, tu as ressenti toute la tristesse ainsi que la splendeur de ce drame naturel. Mais tu sais mieux que moi que l'homme doit accepter ce que la nature lui offre, aussi bien que ce que la nature lui retire.
Antoine Bertholom



Marcher, marcher, marcher. Sur cette route, à contre-sens du flot, les voitures roulent. Elles quittent la ville. Plus d’espoir plus de vie. Je reste, à contre-sens du flot. Pour l’espoir pour la vie. Continuer de marcher comme d’habitude. Pourquoi changer ? Pourquoi partir ? Mais c’est plus dur que d’habitude, il faut marcher à contre-sens du flot. Il faut être fort, comme la carpe Koï, qui dans la légende remonte le torrent et devient dragon. Je suis une carpe qui remonte à contre-sens du flot. Rien d’autre n’a d’importance, plus de douleur ni de colère, seulement l’air dans mes poumons. Belle et dangereuse. Je vais marcher un peu, à contre-sens du flot.
Enora Gourlaouen


"Regarde
Comme la taule et le fracas s'harmonisent
Tandis que la calme colline s'amenuise
Lourdement, ces mécaniques abandonnées
Masquent la véritable beauté.
Au loin tu peux la deviner
Elle est là, étouffée, noyée
Par un flot inerte et silencieux.
Ressent le paradoxe tumultueux
Machine. Mort.
Le Chaos.
Paisible. Doux.
Le Beau Regarde"
Alissandre Alazard
 




 
 
Cette photo m'inspire plénitude et tranquillité. Désertique et mystérieuse, elle cache pourtant bien son jeu. Ces arbres semblent s'envoler vers les cieux comme si ils souhaitaient s'échapper de ces lieux. Ils s'en doutent, ce calme n'est pas rassurant. Sans bouger cette nature sera destinée à périr. L'auteur exprime sa volonté de garder ces lieux intact, d'immortaliser ce moment. Oh, nature vulnérable, je comprends maintenant que ce paisible moment cessera lorsque Frederick Carnet chuchota " J'aimerais mourir sans colère"
Charleyne Stern
 
Voyager, observer, ressentir, s'émerveiller devraient être les mots clefs. Pourtant, ici, rien ne fait dire qu'il faut s'époustoufler. Tragique, dramatique, là où un jeu d'ombre et de lumière vient dominer le parc,... le vide. Rien, inerte, les jeux d'enfants restent statiques. Foudroyé par une catastrophe plus rien ne l'anime. Là où il devrait pourtant y avoir de la joie et des rires, c'est un calme pesant, envahissant qui provoque en moi un violent emportement. Puis j'ai cette phrase qui revient sans cesse dans ma tête : j'aimerais mourir sans colère.
Célia Donna
 
 
Il faisait calme dans mon cœur, dans mon âme.
Je n'avais plus peur
Je n'avais pas baissé les bras, abandonné
Laisse passer la douleur, qu'elle s'en aille, qu'elle s'en aille.
Il faisait juste calme dans mon cœur.
Un pâle soleil caressait la froide colère qui montait et se répandait en moi
La réchauffait, l'enserrait, l'embrassait, calmant l'envie, le déchaînement, la violence
Pourquoi?
Inspire. Respire. Inspire. Respire.
Tempère-la. Recommence.
N'aie pas peur, là, ils ne te feront plus de mal.
Quand tu tapes, t'acharnes et perds le sens des choses
Quand tout brûle au fond de toi et que tu imploses
Stop. Chut... Calme ton cœur, ton âme
Arrête ce futile combat contre l'invisible
Des forces vides de sens contre lesquelles tu viens t'écraser
J'ai fait le calme dans mon cœur
Laisser le soleil disperser la tempête et la haine
puis-je maintenant?
J'aimerais mourir sans colère.
Lucigaël Vaiti
 
 
 
Stop ! Arrête-toi … Mais que fais-tu ? Tu t’agites dans tous les sens… Tu accélères, tu désespères… Tu pars, tu cours… Mais vers où ? Tu suis la foule, voilà la triste vérité. C’est tout ce que tu sais faire ! Suivre, ne pas se poser de questions, avancer pour mieux se fondre dans la masse. Alors pour une fois, arrête-toi. Lève les yeux vers le ciel. Prend le temps d’observer. Observer chaque détail. Les arbres sans feuilles, les nuages poudreux… Et cet immeuble qui s’élève vers le ciel. Cet immeuble qui semble ne jamais s’arrêter. Il monte, monte, monte… Sans limites, sans but…
Gaëlle Blanchard


Peu importe la façon
Peu importe les raisons
Que la terre entière
Me laisse un goût amère
Je m'élèverai de tout mon tronc
Clamant un triomphe sans nom
Et ce, peu importe les misères,
Car j'aimerais mourir sans colère.
Camille Emmanuelle
 
Colère. Dans mes grands espaces boisés, les oiseaux ne chantent plus. Et sur mes hautes montagnes enneigées, la neige a fondu. Partout où l'Homme est passé, une partie de moi s'est dégradée. A couper, brûler, fabriquer, consommer, jeter ... Polluer. Alors j'ai craqué. D'une vague son royaume j'ai envahi. Mais finalement, c'est moi que j'ai affaiblie. Car l'Homme, dans sa bêtise, m'a réservé une nouvelle surprise. Radioactivité, c'est le nouveau nom, De ce sport maintenant de renom, Où on modifie la nature pour être plus puissant, Et le pire, c'est qu'on se croit intéressant. Si je devais mourir, j'aimerais mourir sans colère. Mais moi, Nature, ne verrai jamais s'éteindre la lumière. Marine Bourdon

LOGORALLYE ! Les MàNAA empruntent dix mots à l'inventaire des genres de Roland Barthes


"Il était une fois... une jeune dame gardée sous le MANTEAU de ses plus proches parents. Agacée de constamment devoir se serrer la CEINTURE et de se faire remonter les BRETELLES, celle-ci décide de rendre son TABLIER et de retourner sa VESTE. C'est alors qu'elle fuit loin de la maison et se réfugie dans les bois, endroit qu'elle croit connaître comme sa POCHE. Or elle finit toujours par se perdre, mais ça, c'est une autre paire de MANCHE. Une fois sortie de sa détresse, elle déniche miraculeusement une robe qui lui va comme un GANT. Là, elle ne tarde pas à trouver CHAUSSURE à son pied. C'est la rencontre avec un mystérieux inconnu, un coureur de JUPON peu habitué à se prendre des VESTES. On dit qu'ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants, mais nulle ne sait si Princesse n'en est pas venue à s'en jeter un derrière la CRAVATE."
Laura Fekih



 *

        Un jour j'enfilerai ma CAPE, et le monde suivra cette LIGNE, Il adoptera un nouveau STYLE, de vie. Car malgré que je sois CÔTÉ, pour l'instant je suis au BORD de la société. Je vous dis cela parce que ce soir, j'ai la BLOUSE ; la blouse à en écouter le musique puisque je ne suis pas sûr d'avoir la TAILLE pour joindre mon monde, au monde. Oui car ce monde je m'en ECHARPE ! Pour tenir le cou … Alors à défaut de prendre un COL, je sers de poids sur les épaules du monde … Je me sens CHÂLE.
Loïck Batardot
*
Ce matin au réveil, rien de nouveau. 5 h 00 du matin pas d'inquiétude, je suis à l'heure. Le temps de cligner des yeux et il est déjà 7 h 42, là je suis en retard. Pas le temps de manger, je dois privilégier l'habillage. Je pose à peine un pied à terre que je tombe dans un capharnaüm digne d'une description des enfers. Je devine que je piétine mes vêtements. Cette soudaine violence ne leur plaît pas et ils choisissent de riposter.
Mes deux bracelets se jettent à mon poignet gauche et m'immobilisent sur le sol. Leur morsure est si puissante que j'arrive à peine à soulever mon corps du plancher. A la merci de mes habits, je ne peux qu'espérer que mes vêtements ne soient pas dépareillés. Du coin de l'œil, j'aperçois ma marinière qui glisse sur le sol. Arrivée à mon niveau, elle m'engloutit jusqu'au ventre. Sur mon fauteuil, mon châle vert prend son envol pour atterrir sur mes épaules. De loin, j'observe ma jupe jaune et mon jupon qui se lancent dans un combat que je décris comme sanglant. D'un bond, la jupe s'élance vers moi et aspire mes jambes. Pour se venger, le jupon la recouvre entièrement, la faisant disparaître. A côté de mon armoire, mes babouches prennent leur élan pour courir jusqu'à mes pieds et les mordre au dessous des chevilles. Mes bracelets me forcent à me mettre debout. Ma toque en fausse fourrure se pose avec violence sur mon crâne décoiffé. Sur mon bureau, mon écharpe se prépare à une attaque. Brusquement, elle m'entoure le cou en m'étranglant. Derrière moi, j'entends mes moufles s'agiter. Elles bondissent et me croquent les mains.
Le calme s'installe. La tempête arrive. Le kimono que j'ai ramené du Japon s'élève en l'air et me serre avec violence, me propulsant hors de ma chambre.   
Gwendoline Jésus
 *
 
     La basque
     La basque, tout comme un bas en bas du canezou, accroché par la chaîne, délaissée abandonnée entre babouche et martingale. Triste et seule face à la manche, crie au secours !
     Rien, pas un pli. Peut-être au loin à l'horizon une barboteuse mais rien, pas un bruit.
     Seul l'ensemble est capable d'associer le devant du dos, le haut du bas. 
Rémy Lenoir
    Fleur court.
     L'humidité a plaqué ses cheveux blonds sur son visage angélique, à présent déformé par un rictus de panique.
     Tandis que ses poumons en feu lui réclament désespérément de l'air, elle tente un regard rapide derrière. Grossière erreur.  La voilà qui s'affale de tout son long dans la boue, salissant son beau manteau blanc et déchirant son pantalon en velours côtelé. Mais, après tout, son style vestimentaire n'a plus aucune importance. En totale désynchronisation, ses mains agrippent les feuilles mortes humides dans un mouvement frénétique, tandis que ses genoux pataugent dans un sol détrempé. La voilà enfin debout …Mais la voix résonne dans la forêt : "Mon petit ? Viens par ici, ta Mère-Grand a un joli habit juste pour toi !" L'image de l'ensemble rouge, trônant dans la vitrine du salon, de ces gants brodés, cette écharpe tissée … et ce chaperon … Fleur aurait dû se méfier de la petite mamie en tablier blanc dans sa camionnette bordeaux . Et surtout lorsque, portant le nom d'une enseigne de la région, celle-ci ne connaît pas le chemin et demande de l'escorter … Pour finir par l'emmener dans une maison aux murs délavés, à la toiture entravée et où, à l'intérieur, tout est carrelé de blanc. Seule cette vitrine glauque, gardant l'ensemble vermeil, tranche avec le reste du décor.
     Son sang se glaça lorsqu'elle reconnut au loin le bruit d'une ceinture que l'on claque au sol.
"Allez, ma fille, ne faits donc pas l'enfant, viens donc essayer ton ensemble, qu'on puisse s'amuser toi et moi …" 
    Fleur ne sait pas ce qui l'attend quand Mère Grand l'attrapera. Parce que Mère Grand attrape toujours ses proies. Elles ont toutes essayé, refusé de porter le capuchon, de fuir par la forêt, de s'enfoncer de puis en plus dans ses profondeurs… Sans savoir qu'au bout, tout le parc est ceinturé d'un mur de fer, infranchissable. Son terrain de jeu. Un sourire s'esquissa sur ses lèvres maigres. Elle essuya ses mains sur son jupon, et son rire glauque transperça la nuit. Que la chasse commence.
Marine Bourdon
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La tenue
Lorsque l’azur se lève, il est temps de se décider sur la tenue que l’on souhaite adopter jusqu’au soir. Va-t-il falloir se faire remarquer ou alors, être capable de se camoufler, de se faire disparaître dans une masse d’individus. Chaque détail a son importance. C’est pourquoi l’ourlet d’une chemise ou d’un pantalon. L’écharpe ou la cape d’une tenue, doivent être choisis avec la plus grande prudence. Chaque espèce d’accessoire doit trouver son sens et sa place dans notre journée. Si nous nous élançons dans une journée studieuse, alors on optera volontiers pour des motifs géométriques, aux formes triangulaires ou cubiques. Cela nous donnera de l’assurance et du courage. Mais si l’on souhaite se camoufler, mieux vaut éviter les écharpes à pois ou les gilets rayés trop colorés. Alors, mesdames et messieurs, nouez cette cravate en nid d’abeille à votre cou, et allez-vous en travailler !
Antoine Bertholom
 
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Les bigoudènes
Le jour de leurs noces, les Bigoudènes se parent de gilets aux couleurs vives, de broderie d’or et de perles. Leurs talons claquent quand elles dansent et leurs jupons volent.
Mais leur gloire, c’est leur coiffe de dentelle fine aux motifs de fleur, qui s’élance vers le ciel, au mépris des coups de vents et averses qui balaient souvent la contrée. Toujours plus haut ! C’est un défi qui oblige les femmes à un port de tête d’une incontestable noblesse.
Dans ce pays à la fin des terres, la coiffe commande le chapeau, ce sont les femmes qui méritent de commander à force de sacrifice, d’abnégation et d’orgueil indomptable. Il est impossible sans elles d’expliquer un quart de ce que nous sommes, car si les coiffes s’évanouissent année après année, l’héritage des Bigoudènes est plus que jamais vivant.
Enora Gourlaouen

 
 
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Devine qui vient me voir la semaine dernière, ma Claudine ! la pauvre ! J’vois bien qu’il y a quelque chose qui cloche, c’est pas son style de se mettre dans tous ses états, de se prendre le chou, mais j’ai senti que c’était à cause de cet homme auquel elle s’attache, se rattache, se raccroche, se rattrape…
     Elle voulait pas m’le dire, prend des pinces, fait le pourtour de la chose, me cache – à moi ! ce qui se passe, elle est de mauvais poil aujourd’hui, c’est tout ce qu’elle me dit…
     Et moi de lui répondre, « my baby-doll, tu caches tout, cache-poussière et par-dessus tout, à moi tu n’oses pas avouer les fautes de ton prince, de grâce, de Galles ! Plaque-le ! Que veux-tu que j’te dise d’autre, il est collant, collé à tes basques, toujours sur tes talons tout le temps, mais suffit que tu tournes le dos, voilà qu’il te fait des infidélités ! Il est complètement toqué, ce coureur de jupons, renvoie-le dans ceux de sa mère Berthe ! »
    Je lui ai dit « Chanel, ma belle, tu ne trouveras un autre ! Tu verras, tu verras, dès ce soir, je t’emmène, dans de riches lieux, briser les chaînes de ton nouveau célibat ! » Et là elle me répond : « Je suis imperméable à toutes tes critiques. » Han ! des critiques ! Que veux-tu, ma Claudine, elle l’a dans la peau son italien, d’une flèche au cœur, il l’a eue la Chanel, oh là là, elle s’en rendra bien compte un jour, mais trop tard…
Lucigaël Vaiti
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    En ce moment, l’hiver est rude. L’utilisation d’une chaufferette de poche est devenue indispensable ! Plus qu’un outil, la chaufferette est devenue l’article de mode pour être swag… Il existe plusieurs types de chaufferettes, la chaufferette-bonnet, bandeau, cravate, plastron et j’en passe ! La chaufferette a été créée par l’armée qui l’utilisait dans leur combinaison de sport pour faire maigrir rapidement après les grandes fêtes telles que Noël. Mais un jour, un soldat effrayé à l’idée d’aller en mission au Pôle Nord, eut l’idée de les intégrer à ses vêtements. Tout y passe : chemises, tabliers, blousons, maillots… À son arrivée sur place il eut aussi chaud qu’une belle journée ensoleillée d’été, sauf qu’il n’y avait pas de soleil ! Dès son retour de mission, il commercialisa son idée, qui eut un succès fou, même en Afrique…
Olson Classonel
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 Être femme et non féminine
      Certains diront qu’elle était belle mais elle l’est toujours. Ni robe, ni talons, ni style et des cheveux courts. Elle cache progressivement sa féminité derrière son manteau. Un manteau pratique, sans esthétique, sans superflu. Une taille dissimulée à cause de tant de mots jetés, avalés et emprisonnés.
     Pas une larme n’a coulé sur sa joue, trop de fierté pour admettre qu’elle reçoit des sacs de coups.
     Une inspiration, elle remonte ses manches et se donne pour nous.
     Pas de reconnaissance mais elle continue, en gardant ses colliers, bracelets seuls souvenirs d’un amour effleuré. Je te dois toute mon armure et jamais je n’espère déposer de fleur sur ton lit car la vie est faite pour des personnes comme toi maman…

Mélissa Rioul
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  C’est le grand moment. Elle m’attend, depuis un moment déjà, allongée sur le lit. Resplendissante. J’ai pris tout mon temps jusqu’ici, de peur de la brusquer. Ou plutôt parce qu’elle m’intimidait dans sa grâce silencieuse. Je dois pourtant me lancer. Je le sais bien. D’ailleurs, c’est pour cela que je m’approche d’elle. Et quel spectacle ! Tout en m’avançant, ce sont de nouvelles parcelles de son être que je découvre, à nouveau, et qui m’émerveillent. Peut-être que poser mon regard sur sa taille me rassure… Ses hanches harmonieuses et sa poitrine rebondie, tout en elle m’attire et me conforte dans l’idée que je me fais d’elle. Serait-ce cette perfection qui m’étouffe tant ? Cette perfection qui me rappelle ce que je m’apprête à réaliser, qui me confronte à la réalité de l’instant… Non il ne faut plus réfléchir. Juste se contenter d’agir, fermement, délicatement tout de même, mais sans pression.
    
     Ça y est, me voilà face à elle. Toute de soie vêtue, au vêtement brodé de motifs floraux et aux bijoux éclatants, même sa tenue aux couleurs chaleureuses me passionne. Je pourrais rester des heures à analyser chaque détail… Je me surprends alors à déboutonner son col, déchirer le vêtement, puis sa doublure, puis à détacher chacun de ses accessoires. Quelle étrange sensation. Elle ne réagit même pas. Je n’ai donc pas à avoir honte de moi. Tout se déroule bien. Quel soulagement. Je peux continuer, tout de même, à l’admirer un peu ? Je n’y vois pas de mal… « Tu es si belle… »
     « Quoi, t’as parlé ? » Une voix rauque surgit tout à coup de nulle part. La voilà qui reprend : « J’t’ai pas écouté, désolé. Tu disais ? Eh mais… T’as toujours pas commencé ? » Ah, c’est lui. Sacré Franck, il n’y comprend décidément rien.
     « Tu sais bien que c’est ma première fois…
     -  Rien à faire, c’est pas une raison pour fainéanter. Allez, finis-en vite, je te regarde. Comme ça, je te dirai si tu t’y prends bien. »
     Il n’a pas tort. Je suis complètement perdu dans mes pensées en oubliant tout ce que j’avais appris jusqu’ici. Plus question de reculer.
     « Donc je commence par la vider, et après je pourrai l’embaumer, c’est bien ça ?
     -  T’as tout compris ! Lance-toi à présent. »
     Génial. Dépecer un si joli corps me pince un peu le cœur, mais je peux enfin faire mes preuves à mon futur patron. Alors voilà. C’est ainsi que tout prend fin. Adieu gente demoiselle, je vais me surpasser pour que ta famille admire ton si joli visage une dernière fois. On se revoit à ton enterrement.
Camille Chautru
 




Les MàNAA spectateurs des Amours Vulnérables de Desdémone et Othello aux Amandiers

"Plus la pièce progressait, plus les spots étaient bas et allongeaient les ombres, tout en assombrissant la scène, accompagnant la montée dramatique de la pièce" Mélanie Loren de Moura

 
 


"La pièce s'ouvre sur une architecture de bois nue. Les quelques éléments qui composent le décor se résument à des bidons vides et des cagettes en plastiques. C'est à se demander si ces objets n'auraient pas été laissés là par hasard sans l'intervention du scénographe, Laurent P. Berger. Ce décor aux allures épurées évoque la ville, celle de Venise, là ou le drame prend place. C'est un décor mouvant, il se monte et se démonte au rythme d'une danse : les acteurs eux-mêmes, devant les yeux des spectateurs, mettent en forme le décor au travers d'une chorégraphie. Sur la scène, danseurs, musiciens et comédiens se rencontrent pour offrir plus qu'une simple histoire.

Les comédiens jouent d'une façon très déclamée, une véritable "adresse" au public voulue dans la mise en scène de Razerka Ben Sadia-Lavant. Cette frontalité face au public gâche un peu l'effet de vraisemblance, lequel est habituellement créé par la notion de ''quatrième mur'' au théâtre.

Dans le choix des accessoires et des costumes, on retrouve cet aspect minimaliste, puisque les comédiens portent des habits contemporains assez simples. Quelques accessoires, mais très peu, par exemple la canne-siège assise de Iago ou le mouchoir d'Othello. Les objets sont aussi porteurs de sens : une table en bois pour signifier un espace de fête, un tapis pour un lit.

La lumière, élément important de la scénographie, éclaire l'espace scénique en douche tout au long de la pièce. Cet éclairage vient frapper l'architecture de bois et créer des ombres portées au sol, lesquelles semblent détourer les murs invisibles de chaque pièce. Il arrive parfois que d'autres projecteurs s'allument et apportent un rythme plus soutenu, notamment lors de passages chorégraphiques pour jouer avec les ombres du corps." Laura Fekih


"Un pied dans le passé, un pied dans le présent et on recommence !" Maëlle Lemaire
 

 

 

 
"La scène finale illustre et résume bien ce souffle de modernité et de dynamisme. Lorsqu'Othello va tuer Desdémone, les jeux de lumière et de musiques permettent de bien visualiser les tiraillements du Maure. Les danseurs s'agitent autour de lui, comme des démons, et Desdémone se secoue comme si elle était désespérée et prise de folie." Léa Moureau

 


 
 

"La chanteuse, Sapho, venait parfois chanter et semblait jouer le rôle d'un chœur antique comme dans les tragédies. Elle semblait arrêter le temps." Claire Delville