À la manière de Ponge, qui nous invite, dans La rage de l'expression, à avoir recours au dictionnaire, à l'encyclopédie, à l'imagination, au rêve,au télescope, au microscope, aux deux bouts de la lorgnette, aux verres de presbyte et de myope, au calembour, à la rime, à la contemplation, à l'oubli, à la volubilité, au silence, au sommeil..."
Le pâtisson
À première
vue le pâtisson semble être un légume inachevé, un mélange entre pâte et
hérisson, une invitation à pâtisser, à découvrir la saveur de la courge. Il a
une allure amusante de demi-cervelle. Ses bords arrondis donnent envie de les
agripper. Sa peau orange attire notre regard, mais elle laisse perplexe devant
la projection des taches qui recouvrent partiellement la demi-sphère, donnant
l’impression d’une éclipse solaire. (Margaux
Legru)
À le voir comme ça, il semble lourd,
aussi lourd qu’une carapace protégeant tout son intérieur pour que rien ni
personne ne parvienne à le fissurer.
Il est imposant. Imposant mais
difforme et bosselé à différents endroits de sa surface, montrant une
fragilité, rappelant la vieillesse, les marques que le temps a laissées.
Ici les couleurs se mélangent, le noir
se forme sur cette couche orange, comme une tache d’encre qui prolifère,
l’absorbe petit à petit, ne laissant plus rien sur son passage.
Il ressemble à la moitié d’un rond qui
n’aurait pas trouvé sa deuxième partie - comme déconstruit. (Eva Poupaux)
La courge pâtisson a deux facettes,
elle possède une surface lisse et tachetée. Elle forme la moitié d’un globe,
une demi-sphère. Au nord je vois l’Arctique, je n’aperçois pas de plage, mais
le sol arbore une couleur verdâtre. Au sud la mer rencontre remarquablement la
terre. La mer orange inonde des milliers d’hectares de terre, les continents ne
sont plus définis et forment des archipels qui se succèdent. (Sohna Diop)
La courge pomarine
La courge
pomarine possède une peau d’un orange si vif qu’elle se confondrait avec les
citrouilles. Avec une forme singulière qui semble être prédécoupée comme les
quartiers d’une orange et si petite qu’elle peut tenir dans la paume d’une
seule main. Corps dur et tendre intérieur créent la surprise. (Thérèse Gomis)
La courge pomarine, dont les traits
simples laissent penser à une citrouille, fait songer à une habitation. Ces
traits qui se croisent et se séparent sont des sections d’appartement. À
l’intérieur, c’est coloré, bondé. Ses habitants sont ses graines. À l’extérieur
la devanture vieillit malgré l’uniformité de sa couleur - des crevasses, des
marques du temps.
Me vient alors à l’esprit que cette
courge n’est plus seulement une habitation, c’est une planète, clairement. La
disproportion des habitants centrés, cette épaisse couche blanche les
encerclant, l’atmosphère.
Je viens de détruire une planète. (Océane Traore—Mous)
Semblable à une citrouille de sa
taille uniquement on l’en distingue. Orange, possédant des quartiers visibles,
la courge pomarine pourrait constituer la parfaite citrouille de poche – celle
qu’on vide et qu’on sculpte et dans laquelle on viendrait insérer une bougie,
avant de la laisser pourrir sur le rebord de la fenêtre.
Haute de cinq centimètres à peine,
elle semble à la fois si fragile et pourtant si solide. Et sa peau rigide
laisse apparaître quelques irrégularités que l’on pourrait apparenter à de la cellulite,
molle.
De nature si petite, on ne viendrait à
se demander si, une fois, dépecée, il en resterait (même) quelque chose. (Salomé Baude)
La courge
pomarine, un fruit ? Un légume ? Son nom ferait penser à un fruit, mais ce n’est pas
une pomme – ni quelque chose de bleu. Plutôt complémentaire : orange. (Iris François)
Une forme parfaitement dessinée, des
rainures orangées, c’est forcément le courageux Jack Be Little que l’on appelle
aussi Courge Pomarine, en référence à sa femme, son opposé, la pomme bleu
marine.
Son nom et son goût de châtaigne sont
inspirés du petit écureuil qui autrefois éclairait l’intérieur des courges pour
se promener dans les bois. (Marion Donné)
La courge
pomarine ou l’enfant de la citrouille. Son nom rappelle la mandarine, et il est
vrai qu’elles ont la même taille et la même couleur. Si l’on regarde cette
mini-citrouille de haut, on pourrait apercevoir une fleur, ses traits partant
du centre du chapeau et donnant une allure courbée au légume, l’impression de
pétales. (Hélia Bras)
La courge est un petit objet comme un
autre, comme n’importe lequel légume, comme un coquillage, comme un sujet.
Bleu, rouge, jaune, plus longue ou plus fine, cela dépend de la surface et de
l’espace.
Je peux donc prendre cette pomarine et
la démesurer, la décomposer, la
diviser en petits morceaux et réaliser mon œuvre. Cette forme ronde, en relief,
deviendra ma nouvelle création. Sa chair douce, jaune, agréable, sera le sujet
de mon étude. Je suis un artiste donnant la renaissance à un nouvel objet
combustible au goût de noisette. (Yulia
Avdonina)
La courge spaghetti
La courge spaghetti,
une traversée trans-Atlantique.
Cette cucurbitacée
orange clair, jaune, blanche ou encore vert pâle, porte bien des couleurs. Par
sa chair blanche et son incroyable compétence à se transformer en filaments,
elle s’est vue nommer d’après le plat dont elle est le sosie. Spaghetti, plat
originaire d’Italie, fondement même de sa gastronomie – un mot qui nous fait
penser penser « pâtes » et non « courge » (d’autant que
cette pauvre courge est elle-même originaire d’Amérique du sud). (Camille Domain)
La
courge Butternut
La doubeurre fond à
la casserole, mais n’est pourtant pas issue de lait – il s’agit d’une
cucurbitacée. Rien à voir avec les cétacées, même si l’eau y est présente.
En tarte ou en soupe, cette courge
musquée n’est autre que la butternut, jaune pâle, à la forme cacahuète. (Maxime Zanko)
Le
potimarron
Cucurbitacée couleur
cuivre aux allures d’un adolescent pubère, avec une peau poreuse et acnéique -
on y retrouve aussi la peau d’une personne âgée avec des cicatrices :
c’est une courge mûre, jeune et vieille à la fois.
Je parle de la courge
présente en face de moi, ballon de montgolfière qui d’ailleurs pousse fièrement
dans les potagers et nous montre sa présence par sa couleur vive. (Tristan Sauvage)
Le
potimarron bleu de Hongrie
Dans des cages cartographiées,
certainement égalisées, il y a une autre cage, demeure, quoique logis ou foyer
où repose une chose – cette forme en oignon n’a guère d’importance à vos yeux,
j’en ai la preuve car je suis la seule à vouloir écrire dessus – sa couleur un
peu grisâtre et bleue vous répugne peut-être, ou davantage sa forme et ses
rides indéfinies.
Et quand vous vous y
aventurez un orange vif et ferme vous plonge le temps d’un instant dans une
fête octobresse. Derrière son apparence sinueuse et balafrée, vous trouverez un
goût sucré. Sa platitude peut réellement vous emmener en des lieux
inexplorés ; ne sous-estimez pas le potimarron bleu de Hongrie. (Léa Restoueix)